Maria Lamas : l'exil d'une féministe
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Date
- / Cancelled / Sold out
Localisation
Maison du Portugal - André de GouveiaCité internationale universitaire de Paris |
7 P, Boulevard Jourdan, 75014 Paris |
La deuxième saison du cycle de conférences Parcours d’intellectuels en exil : un humanisme sans frontières, conduit par Álvaro Vasconcelos est arrivé à son terme des présentations, avant une session conclusive qui aura lieu le 2 décembre de 2024. L’ensemble du cycle a été organisé par la Fondation Calouste Gulbenkian – délégation en France en partenariat avec la Fondation Maison des Sciences de l’Homme. Cette fois, la séance s’est tenue à la Maison du Portugal – André de Gouveia de la Cité Internationale universitaire de Paris.
Le directeur de la Maison du Portugal, João Costa Ferreira, a adressé un mot d’accueil aux présentatrices, au présentateur et au public nombreux pour le séminaire intitulé Maria Lamas : exil d’une féministe. Si cette figure est quelque peu méconnue en France, elle a joué un rôle actif dans la critique de la dictature portugaise depuis l’étranger et notamment en France. Nuno Vassallo e Silva, directeur de la Délégation en France de la Fondation Calouste Gulbenkian, a ensuite introduit les différentes personnes qui allaient prendre la parole tout en évoquant la figure de Maria Lamas qui n’est autre que sa grand-tante.
En l’absence de Maria António Palla, journaliste et féministe, Isabel Barros, chargée de la communication de la Fondation Calouste Gulbenkian, a lu le texte de cette première. Lors de cette intervention, Maria António Palla évoque sa rencontre avec Maria Lamas et retrace son parcours. Née à Torres Novas, elle vient d’une famille aisée d’industriels et elle reçoit une éducation religieuse. Elle se marie mais entreprend rapidement de divorcer, ce qui n’est pas conventionnel pour l’époque. Elle part vivre à Lisbonne et rejoint le journal O Século où elle dispose d’une chronique dans le supplément féminin Modas & Bordados (Modes et broderies). Elle profite de cet espace médiatique pour rédiger des articles engagés. Elle est contrainte de quitter le journal O Século en raison de son opposition à la dictature. Elle rédige deux ouvrages sur les femmes portugaises. Elle commence à la fin des années 1950 une vie d’exil et si elle fait de Paris l’un de ses principaux points d’ancrage, elle voyage dans de nombreux pays. Elle rentre au Portugal lorsque Marcello Caetano est président du Conseil en 1969, mais elle ne se sent libre qu’après le 25 avril 1974.
Álvaro de Vasconcelos prend la parole afin de rappeler quels ont été les objectifs de ces cycles de conférences tout en précisant que quatre femmes ont été l’objet de séances au cours des deux saisons. Il souligne que Maria Lamas était non seulement consciente de sa condition féminine mais aussi opprimée par la dictature. Son courage doit être souligné, d’autant plus dans un pays où le mot de féministe n’est pas beaucoup employé, encore de nos jours.
Maria d’Aires Caeiro prend la parole. Elle est la petite-fille de Maria Lamas et entend rappeler la figure sa grand-mère. Elle souligne les deux grands combats de Maria Lamas que sont le pacifisme et le féminisme. La ville de Paris doit être considérée comme un point de passage avant d’autres voyages pour défendre ses causes qui lui tenaient à cœur. Maria Lamas passe trois séjours à Paris, de durée inégale : un premier de quelques mois en 1953 ; un second entre 1957 et 1959 ; un troisième plus long entre 1962 et 1969. Entre les différents voyages, elle séjourne dans un hôtel à proximité du Boulevard Saint-Michel. De là, elle reçoit toutes les personnes qui la sollicitent ou bien veulent la rencontrer, aussi bien les professeurs universitaires et les personnalités liées au milieu culturel (Joaquim Barradas de Carvalho, Jorge Reis, Júlio Pomar et Alice Jorge, entre autres) mais aussi des personnes avec des difficultés administratives dont le nom de Maria Lamas leur a été recommandé. En raison de son âge avancé, Maria Lamas décide de rentrer au Portugal à la suite de l’arrivée au pouvoir de Marcello Caetano.
Anabela Mota Ribeiro prend ensuite la parole. Autrice et réalisatrice de programmes culturels, elle revendique d’emblée d’être féministe, une femme engagée dans la lignée de Maria Lamas. Elle aborde des éléments de la biographie de Maria Lamas qui n’ont pas été évoqués. Par exemple, elle rappelle que cette figure majeure du xxe siècle portugais considérait le gauchisme et le christianisme – cette dernière était très croyante – comme des synonymes. En dépit de sa foi, elle s’est mariée deux fois, n’a jamais divorcé de son second mari mais elle a eu de nombreuses relations amoureuses dans un pays encore très conservateur. Elle a eu trois enfants tout en travaillant très jeune. Elle évoque son livre Mulheres do meu País (« Femmes de mon pays »), fruit d’un voyage de deux ans dans toutes les régions du Portugal. Elle a traduit, entre autres nombreux titres, Les Mémoires d’Hadrien de Marguerite Yourcenar. Elle a donc, en plus de son activité de militante, une production littéraire et une activité culturelle qui doivent être soulignées.
Un débat commence avec le public où sont mentionnés l’importance de la sororité, la participation de Maria Lamas au procès des Trois Marias (Maria Isabel Barreno, Maria Teresa Horta, Maria Velho da Costa), sa participation politique au Parti communiste portugais après 1974, mais aussi la question de la place du féminisme au Portugal en 2024, alors que l’essentiel des postes de pouvoir sont encore occupés par des hommes.
Enfin, Barbara Alves Rangel, qui travaille au Centre audiovisuel Simone de Beauvoir, prend la parole pour présenter un extrait des archives visuelles du Centre, et notamment des rushs de l’une des soirées de soutien aux trois Marias à Paris. La captation a eu lieu le 21 octobre 1973 et on peut y voir notamment Delphine Seyrig lire des extraits des Nouvelles Lettres portugaises, l’œuvre parue en 1972 qui a conduit les trois autrices portugaises à un procès à partir de 1973. Une fois la projection terminée, et après quelques précisions, le séminaire se termine.
Rapport rédigé par Christophe Araújo
Conférence organisée à l’occasion de la Célébration des 50 ans du 25 avril 1974, la Fondation Calouste Gulbenkian – Délégation en France en collaboration avec la Fondation Maison des Sciences de l’Homme, la Maison du Portugal – André de Gouveia et le Centre audiovisuel Simone de Beauvoir.
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