Mystères de Porto / Mistérios do Porto

Dans les coulisses du travail de traduction annotée | Sandra Teixeira

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Dans le cadre des Rencontres de la Bibliothèque Gulbenkian, nous avons le plaisir d’accueillir Sandra Teixeira pour la présentation de l’ouvrage Mystères de Porto / Mistérios do Porto.

« Journal d’une nuit d’insomnie » de Miguel Miranda, « Mademoiselle Olímpia et sa bonne Belarmina » de José Régio et un extrait de Pages de Porto de Vasco Graça Moura composent ce volume thématique. Ces trois textes au style très différent proposent un tableau bien vivant de la ville de Porto, à l’architecture et aux paysages si envoûtants. Par les méandres des rues ou sur les rives du Douro, narrateurs et personnages nous convient à une déambulation souvent surprenante, à travers laquelle la ville nous révèle quelques secrets.

 

Il s’agira d’évoquer au cours de cette séance les coulisses du travail de traduction, à travers des exemples précis de difficultés rencontrées et de solutions envisagées. Dans la mesure où la collection Bilingue pour tous des éditions Pocket propose des traductions annotées, destinées aux personnes désireuses de renforcer leurs compétences linguistiques par la lecture de textes littéraires, mais aussi aux enseignants qui proposent à leurs étudiants des travaux de traduction, nous commenterons la dimension pédagogique de ce travail, de la rédaction des notes de vocabulaire et de grammaire aux notes qui visent à expliquer les références culturelles.    

Présentation des textes

Miguel Miranda, né en 1956 à Porto, médecin de formation, s’est lancé dans l’écriture dans les années 1990. Il a reçu, entre autres, le prestigieux Prix de la Nouvelle Camilo Castelo Branco en 1996 pour son recueil Contos à moda do Porto (Afrontamento, 1996), dont est extraite la nouvelle proposée, ainsi que le Prix Caminho en 1997, consacré à la littérature policière. Il a publié une majorité de polars, où la ville de Porto est le décor privilégié. Quatre d’entre eux ont été traduits en français et publiés par les éditions de l’Aube entre 2013 et 2016 : Quand les vautours approchent ; Donnez-leur, Seigneur, le repos éternel ; L’étrange affaire du cadavre souriant (traductions de Vincent Gorse) et La Disparition du cœur des symboles (traduction de Pierre-Michel Pranville).

Dans la nouvelle « Journal d’une nuit d’insomnie«   (« Diário de uma noite de insónia »), nous accompagnons le personnage de Jorge Vinagre, ingénieur en biochimie désabusé, lors de sa déambulation près du fleuve Douro, dans le brouillard du petit matin. Il est encombré d’une valise au contenu précieux et de comprimés pour sa psychose qu’il a décidé un jour de ne plus prendre. Le récit alterne entre la description de son objectif, arriver jusqu’au pont D. Luís, l’un des plus célèbres de Porto, et l’évocation de souvenirs douloureux. À travers une description souvent très photographique, le personnage parcourt ainsi la ville et sa vie, dont les mystères, paradoxalement, se révèlent en même temps qu’ils s’obscurcissent au fil de la lecture.

José Régio (1901-1969) né à Vila do Conde, à 30 km au nord de Porto, est l’un des écrivains et l’une des figures intellectuelles les plus importants de sa génération. Enseignant de portugais et de français dans le secondaire, il est poète, dramaturge, romancier, essayiste, mais aussi auteur de nouvelles et de chroniques, historien de la littérature. Il fut également l’un des directeurs de la revue littéraire Presença, publiée entre 1927 et 1940, qui a joué un rôle prépondérant dans l’affirmation du second Modernisme au Portugal (avec notamment la révélation d’un auteur comme Fernando Pessoa et de ses hétéronymes, encore très peu divulgués à l’époque).

La nouvelle  « Mademoiselle Olímpia et sa bonne Belarmina »  (« Menina Olímpia e a sua criada Belarmina ») met en scène, dans les rues de Porto, deux silhouettes d’un autre âge qui s’y promènent tous les jours, sous les quolibets des passants, comme dans un temps suspendu. Mademoiselle Olímpia est une grande dame déchue, mais qui continue à se persuader de sa grandeur. Elle a gardé sa bonne, Belarmina, qui tente, en vain, de la ramener à la réalité. Cette décadence physique et sociale aux marges de la société incarne selon l’essayiste et critique Eugénio Lisboa[1] l’image de la ruine qui résiste malgré tout ; comme les endroits où elle se réfugie, Mademoiselle Olímpia appartient au patrimoine de la ville et sa majesté tragi-comique, servie à regret par une bonne dévouée, nous est révélée par l’ironie acérée de José Régio.

Vasco Graça Moura (1942-2014), né à Foz do Douro, près de Porto, avocat de formation, plusieurs fois élu député européen, a occupé plusieurs postes au sein de diverses institutions politiques, médiatiques et culturelles. Il s’est imposé comme l’une des principales figures intellectuelles et littéraires de son époque. Poète, essayiste, romancier, traducteur, il reçoit en 1995 le prestigieux prix Pessoa qui couronne son œuvre, mais qui a surtout salué sa traduction de la Divine Comédie de Dante (en rimes !). Traducteur, entre beaucoup d’autres auteurs, de Racine, Villon, Rilke, Pétrarque, il est l’auteur d’une œuvre poétique remarquée, et l’une des voix les plus critiques contre le nouvel accord orthographique de la langue portugaise.

Pages de Porto (Páginas do Porto) est un bel ouvrage illustré dans lequel l’auteur rend hommage à « sa » ville de Porto : il en parcourt les endroits emblématiques tout en faisant défiler ses souvenirs, entrecoupés de textes qu’il a écrits sur Porto et sa région. Certains passages portent sur des lieux précis, des pratiques sociales, des traditions culturelles – on y trouve par exemple une évocation nostalgique de la manière dont le vin de Porto était consommé par le passé. L’extrait choisi décrit le Porto de son enfance, celui que ses parents lui ont transmis, et celui qu’il a progressivement découvert et qu’il s’est approprié, notamment grâce aux librairies, au fil de ses pérégrinations de jeunesse. Vasco Graça Moura y décrit aussi l’éducation reçue au sein d’une société patriarcale, empreinte de références françaises. À travers ce parcours autobiographique, l’auteur nous offre le tableau d’un Porto à la fois vivant et disparu, dans lequel on s’attend d’ailleurs à tout moment à croiser Mademoiselle Olímpia et sa bonne…

[1] Eugénio Lisboa, A particular tristeza das ruínas, Academia das Ciências de Lisboa, 2015.

Sandra Teixeira est Maîtresse de Conférences en Études Lusophones à l’Université de Poitiers. Ancienne élève de l'École normale supérieure de Fontenay-Saint-Cloud, agrégée de portugais et docteur en Études Lusophones, elle a écrit de nombreux articles sur le poète et traducteur portugais Vasco Graça Moura, auquel elle a consacré en 2006 sa thèse de doctorat, et travaille notamment sur la poésie portugaise du XXe siècle, l’intertextualité, les rapports entre la poésie et les autres arts, la traduction. Elle enseigne la langue portugaise, la traduction, la civilisation et la culture du Portugal et des pays de l’Afrique lusophone.

Elle a coorganisé l’ouvrage Donner un nom à l’obscur. Écritures du divin, écritures du sacré dans la poésie ibérique et latino-américaine (CRLA-Archivos/ Université de Poitiers-CNRS et Amérique latine, Pays ibériques-Université Bordeaux Montaigne, 2015) et publié Mystères de Porto. Mistérios do Porto, textes de Miguel Miranda, José Régio et Vasco Graça Moura, traduction et notes de Sandra Teixeira, (ÉditionsPocket, 2022). 

   

 

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